18h. Un hôtel à Pigalle. Anneke (chanteuse charmante) et Hans (batteur sympa) se soumettent à la première des deux journées promo française, à l’occasion de la sortie de leur nouvel album « How To Measure A Planet », depuis 11h du matin.
Ils avouent être légèrement agacés par les questions récurrentes des « Metal Heads » : « Pourquoi n’y a-t-il pas de vrais solos de guitares ? », « Pourquoi l’un de vos guitaristes vous a quitté ? », « Pourquoi ce changement musical ? » …
Tout cela The Gathering le ressentait comme une nécessité et ils se rassurent grâce à certaines personnes plus ouvertes d’esprit qui comprennent leur démarche.
A vous de vous faire votre opinion sur ce groupe qui refuse de se reposer sur ses lauriers.
    MetalPsycho - Vu l’évolution de votre style depuis votre précédent album « Nighttime Birds », ressentez-vous une pression plus importante pour la sortie de « How To Measure A Planet » que pour vos autres albums ?
(Hans) - Bien sûr nous avons peur d’un point de vue commercial, mais c’est ce que nous devions faire. Cet album était indispensable pour nous réaliser pleinement. Pour un succès commercial assuré, nous aurions pu continuer dans la veine de « Nighttime Birds » avec de belles parties de guitares, car cela a fait ses preuves, mais ce n’est pas comme cela que nous travaillons. On s’est tellement éloigné de « Mandylion » (Ndr : premier album du groupe sur Century Media), ces albums étaient nécessaires à leur époque mais maintenant on veut faire autre chose : changer la production, le studio, les arrangements …, tout cela pour montrer une autre face de The Gathering. En fait, nous nous inquiétons uniquement pour les « Metal Heads ».

(Anneke) - Oui, car au niveau du marché, notre maison de disque est très orientée vers le métal. Nous pensons que cela peut nous porter préjudice s’ils ne font pas de gros efforts pour nous promouvoir dans d’autre type de show ou d’autre magazine. Nous avons des proches qui sont des Metal Heads et qui écoutent notre musique, mais il y a tellement d’autres personnes qui pourraient l’apprécier également. Je pense qu’il y a un marché pour tout.
Hans : Je crois que cela dépend également des pays. En Italie par exemple, les gens aiment beaucoup notre ouverture musicale, même les fans de métal. Mais en France la musique est plus catégorisée. Nous voulons combattre cette sclérose.
 

    Que contient le second cd de l’édition limitée de votre album ?
(Anneke) - Nous avions trop de morceaux pour un cd. Nous voulions créer deux atmosphères différentes grâce à deux cd afin que les auditeurs puissent choisir. Nous avions trop de bons morceaux pour ne faire qu’un simple album. On peut aussi choisir suivant son humeur entre un cd dans la lignée de The Gathering et le second cd plus sombre, plus planant. Tu ne peux pas faire d’overdose de cette manière !
    On ressent, à l’écoute de cet album, toute sorte d’influence, allant du trip hop au pop rock …
(Anneke) - On adore Radiohead, Massive Attack …

(Hans) - Egalement des trucs plus metal comme Voivod ou Prong ou bien des choses plus cool comme Dreadzone, Dub War, des groupes orientés vers le reggae, du dub-rock ; la scène de Bristol avec Portishead et puis Pink Floyd, des musiques plus seventies, du stoner rock … J’adore Fu Manchu. Kyuss sont excellents, ils font partie de ces groupes incroyables et uniques. Nous écoutons de tout, même du classique.

    La Hollande regorge de groupes très ouverts d’esprit, évoluants dans des styles très variés. Pensez-vous que cette diversité soit due à votre culture très ouverte ?
(Hans) - Cela remonte à plusieurs siècles. Au moyen âge, les personnes persécutées pour des raisons religieuses se réfugiaient en Hollande. Toute sorte de cultures se sont retrouvées mélangées : protestants, catholiques, juifs … C’est un pays très libre et on peut le voir à plusieurs choses comme sa politique envers la drogue. En France, vous faites tellement de bruit dès qu’il y a un problème que vous ne vous entendez pas, je trouve que c’est tellement stupide. Beaucoup de personnes fument de la dope ici. Quand je vois Paris, il y a beaucoup de junkies. Il y a beaucoup de problèmes en France et les gens veulent s’en éloigner.
    Comment composez-vous ?
(Anneke) - En général, l’un d’entre nous vient avec une idée et on dit si l’on est d’accord pour en faire un titre. Ensuite, chacun arrange sa partie instrumentale. Les paroles viennent après, car je suis souvent inspirée par la musique. Nous avons tous notre rôle, c’est un travail collectif car chacun participe à la composition. Je pense que c’est la meilleure façon d’écrire car cela nous donne une grande diversité. René, le guitariste, donne souvent la première idée puis les autres se greffent dessus.

(Hans) - C’est pourquoi nous avons un double album au final !
Anneke : Cela n’est jamais ennuyant, si René ne sent pas bien un morceau ou un riff qu’il a lancé on ne craint pas de laisser tomber. Quelqu’un trouvera forcément une meilleure idée.

    « Nighttime Birds » était très figé dans sa structure de base avec des solos bien réglés alors que cet album est plus libre, on sent qu’il y a une part d’improvisation …
(Anneke) - On n’avait jamais improvisé en studio auparavant, on n’avait assez de temps.

(Hans) - C’est très plaisant de jammer. Pour cet album on avait plus d’argent à dépenser, plus de temps en studio. L’enregistrement était différent cette fois-ci car le studio était différent. On a eu beaucoup de possibilités de jam.

(Anneke) - « The Big Sleep » est très spontané, ainsi que « How To Measure A Planet ».

(Hans) - « How To Measure A Planet » a été enregistré en direct sans retouche.

(Anneke) - Ce titre est le dernier du cd n°2, il fait 29 minutes et les premières 15 minutes ont été faites en une prise. On prenait du plaisir à jammer et on entend une montre qui sonne à un moment, puis Hans qui parle. Cest vraiment la meilleure chose que l’on a faite car c’est très spontané.

    La guitare sur « Great Ocean Road » me fait beaucoup penser à Motorpsycho …
(Anneke) - Cool !

(Hans) - Ouais, vraiment. On est de très très très gros fans de Motorpsycho, le premier album est mortel.

(Anneke) - La guitare fait « scratch scratch scratch ».

(Hans) - Ce n’est pas un son métal, c’est sale et craquant. Motorpsycho est un groupe très original que l’on apprécie vraiment.

    Vos pochettes et vos textes sont articulés autour de la nature, c’est essentiel pour vous ?
(Anneke) - Oui, définitivement. On est au milieu de la nature, on vit sur la terre et beaucoup de personnes ont tendance à l’oublier. Nous voulons nous nourrir de ce qui nous entoure et le respecter. Il y a beaucoup à faire pour la nature, l’entretenir, garder l’environnement propre. Nous avons beaucoup incorporé d’arbres et d’oiseaux, surtout pour « Nighttime Birds ». Pour cet album-ci également mais c’est plus un voyage à l’intérieur de l’esprit, une excursion dans l’espace à travers d’autres planètes.
    Tu imagines d’autres planètes avec d’autres formes de vie ?
(Anneke) - Cela serait fantastique.
 
    Tu penses qu’il faille à tout prix les découvrir ou garder le mystère ?
(Anneke) - Peut être garder le secret, continuer seulement d’en rêver. Que cela reste de la science fiction. Certaines personnes veulent absolument tout connaître et l’on est relativement intelligents pour y arriver. Je suis très curieuse de savoir s’il y a des êtres plus intelligents que nous. Certaines civilisations de notre planète étaient peut être plus intelligentes que la notre, comme les Aztèques. Mais si nous ne le découvrons pas, cela reste très stimulant pour notre imaginaire.
    Est-ce que vos prestation scéniques vont beaucoup changer suite au départ de l’un de vos deux guitaristes ?
(Hans) - Non, nous avons déjà joué live depuis qu’il n’y a plus qu’un guitariste, mon frère. C’est plus planant, plus proche de la musique indé. Sur cet album il n’y avait plus qu’un seul guitariste.

(Anneke) - Certains vieux titres avec de solos imposants vont peut être poser problème.

(Hans) - Sur scène c’est une situation différente, je ne fais pas attention si cela ne sonne pas exactement comme l’original. Notre musique vit, elle peut évoluer par rapport aux albums. Cela sera plus facilement écoutable.

Vous allez transformer certains vieux titres ?
(Hans) - Nous ne savons pas encore mais nous ne les changerons pas car ils sont bons. Nous ne voulons pas décevoir les vieux fans, surtout les fans métal, on ne veut pas changer de trop la même année !

(Anneke) - Mêler nos anciens titres aux récents peut donner une bonne diversité sur scène, un bon concert !

Vos projets immédiats ? 
(Anneke) - Jouer beaucoup.

(Hans) - On va beaucoup jouer en Hollande puis on fera une tournée européenne l’année prochaine.

Vous avez une idée d’un groupe qui pourrait vous accompagner ?
(Anneke) - Pas actuellement. Peut être tourner en support d’un groupe bien plus important que nous et de sensibilité différente. Ou bien tourner seul avec un petit groupe. Cela dépendra de qui tourne, combien cela nécessite d’argent, si nos managements se mettent d’accord … Nous ne savons rien pour l’instant.
De quel groupe vous sentez-vous proche, dans la même optique musicale ?
(Anneke) - Peut être un groupe moderne comme Radiohead.

(Hans) - D’autre groupe comme Motorpsycho, mais nous ne voulons pas leur ressembler car ils sont uniques et nous voulons faire notre propre musique.

Un instant avant de nous quitter, Hans avouera rêver de tourner avec Björk car elle a un pubic très ouvert d’esprit. Ce rêve peut paraître fou, mais laissez vous envoûter par « How To Measure A Planet ? » et vous comprendrez que cette musique intense entraînée par cette voix enchanteresse puisse évoquer les rêves les plus fous ! Enfin, MetalPsycho remercie tout particulièrement Jean-Marc Tristani de Century Media grâce à qui cette interview a été possible, ainsi que Anneke et Hans.

Quentin